La Croix de Jésus-Christ

Combien serait instructive une histoire de la croix à travers les âges ! Comme il serait facile de montrer qu'elle seule a toujours été la grande "puissance de Dieu!"

La prédication des Pères de la première période, si l'on en juge par les écrits qu'ils nous ont laissés et par les attaques dont ils furent les objets de la part des païens, fut toute saturée de cette doctrine. Sans doute, on vit poindre de bonne heure certaines interprétations fantaisistes, un matérialisme religieux et une théologie compliquée qui contrastent avec la noble sobriété des Evangiles. L'homme mêle quelque chose de lui à la parole inspirée, dans son effort pour la comprendre et pour l'expliquer. Dès que l'Eglise commit l'erreur mortelle d'unir le glaive à la croix et d'étendre le royaume de Dieu, non plus par la persuasion toute seule, mais par la contrainte sociale et par la magie des sacrements, sa théologie fut faussée. En méconnaissant le caractère spirituel du règne de Dieu, les docteurs – depuis ceux du concile de Nicée jusqu'à ceux de concile de Trente – devaient se tromper aussi sur la nature et la portée de la mort de Jésus. La chose surprenante, c'est qu'ils ne se soient pas trompés davantage, ou plutôt que la splendeur de la croix ait réussi à filtrer à travers toutes les minuties de la scolastique, qu'elle ait illuminé la profondeur des couvents, et produit, en plein Moyen Age, des orthodoxes comme saint François - d'Assise, saint Bernard, Gerson, Thomas a Kempis, et des hérétiques comme Pierre Valdo, Wycleff, Henri de Lausanne, Pierre de Bruys, Savonarole. Cela, c'est le miracle de Dieu.

La Réforme fut un retour à la doctrine centrale de l'Evangile. Pareille à la colombe de l'arche, l'Eglise fatiguée revint à la croix d'où elle s'était écartée. L'invention de l'imprimerie popularisa les Evangiles, et la simplicité lumineuse, la divine fraîcheur de ces récits inspirés rendirent aux croyants le contact avec Jésus, dont les prêtres les avaient si longtemps tenus éloignés. Ce fut une résurrection d'entre les morts. Tandis que Luther prêchait en Allemagne la justification par la foi, Farel magnifiait en France et en Suisse la "Vray croix" qu'il opposait aux superstitions romaines ; Paleario en faisait autant en Italie. L'Europe moderne naquit de cette prédication. Au 17ème siècle, elle donna naissance au Puritanisme ; elle produisit un Cromwell ; elle illumina le génie d'un Milton ; elle mit la plume à la main du sublime chaudronnier John Bunyan (Le Voyage du pèlerin). En France, elle fit croître l'arbre rugueux du Jansénisme, portant cette fleur magnifique : Blaise Pascal.

Nous ne pouvons esquisser ici qu'un aperçu général de cette marche triomphale de la croix à travers le monde. Ne suffit-il pas de rappeler les noms des frères Wesley, de Georges Whitefield, de Rowland Hill, pour qu'on ait présente à l'esprit la plus grande révolution morale, et par cela même sociale et politique, des temps modernes ? Que prêcha John Wesley, dans les 56 000 prédications qu'il fit pendant sa longue vie du nord au sud de l'Angleterre et en Amérique, et auxquelles assistaient des auditeurs de tout rang et de tout âge ? La croix ! Et Whitefield, quand sa voix d'argent se faisait entendre à un auditoire de 75 000 personnes, sur les hauteurs de Bristol, après que les évêques – heureuse interdiction ! – lui eurent fermé l'accès des chaires ? La croix, la croix encore ! Sans cette prédication, l'Angleterre descendait au paganisme, comme le prouve la parole de Voltaire : "Dans ce pays, il n'y a plus de place pour la religion, révélée ou non!".

Ce que les Méthodistes firent en Angleterre, ce que les Moraves firent en Allemagne, dans la seconde moitié du 18ème siècle, par la prédication de la croix, le Réveil – ce qui ne fut d'ailleurs qu'une combinaison de ces deux mouvements – le produisit en France et en Suisse au commencement du 19ème siècle.

Le Protestantisme de langue Française, à la fin de la Révolution, n'était guère qu'un déisme sans vie ; la clarté de la croix s'était éteinte ; elle avait été remplacée par la lueur falote d'un humanitarisme à la Rousseau.

C'est alors qu'arriva à Genève un homme dont l'âme brûlait de l'amour de la croix, l'Ecossais Robert Haldame. Cet homme qui, étant riche, s'était dépouillé de ses biens en faveur des Missions en pays païens, vécut à Genève la vie simple, et se mit à évangéliser les étudiants en Théologie. Il fit briller à leurs yeux la croix, en leur expliquant l'épître aux Romains. Ces étudiants s'appelaient César Malan, Merle, Guers, Bost, Pyt. L'un des convertis de cette époque était un jeune militaire nommé Félix Neff. Ces jeunes gens, devenus chrétiens authentiques, prêchèrent la croix à leur tour, ayant pour adversaires, non seulement la vieille intolérance romaine, mais le protestantisme officiel. Leur activité féconde – leur parole apostolique surtout – firent renaître les Eglises et créèrent toutes les oeuvres chrétiennes que nous possédons aujourd'hui, ou à peu près : Sociétés bibliques, Sociétés d'évangélisation et de missions, Sociétés charitables, presque toutes sont nées du Réveil.

Le grand mouvement missionnaire qui marqua la fin du 18ème et le commencement du 19ème siècle, et qui a fait du siècle dernier, en dépit de tous ses déficits, l'âge des Missions, est né de ce retour à la croix. William Carey en Angleterre, Zinzendorf en Allemagne, Judson en Amérique, croyaient au sang versé pour le salut du monde, et parce qu'ils y croyaient, voulurent que le monde en eût connaissance. C'est au pied de la croix que naquirent les vocations de Robert Moffat, des Morrison, des Caslis, des Arbousset. Livingstone et Coillard eurent dans leur expérience une conversion à la mode méthodiste : le sentiment du péché, la crainte de la condamnation, l'attrait tout-puissant de la grâce révélée sur la croix, voilà ce qui fit d'eux les conquérants et les explorateurs pacifiques, les fondateurs de civilisations nouvelles qu'ils ont été. C'est au pied de la croix que Raikes apprit à aimer l'enfance déguenillée et fonda les premières écoles du dimanche. Georges Müller, l'étudiant allemand sans religion et sans moralité, devint un grand philanthrope par la croix (prenant en charge des milliers d'orphelins). Un regard vers la croix fit naître à la vie nouvelle, et à un apostolat unique par ses résultats immenses, un jeune garçon de seize ans qui s'appelait Charles Spurgeon. Et que dirai-je encore ? Le temps me manquerait si je voulais parler de tous ceux qui ont été « le sel de la terre et la lumière du monde », parce qu'ils ont cru et prêché la croix !

De Ruben SAILLENS – La croix de Jésus-Christ et l'évangélisation (1908).

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